Cela fait maintenant plus de deux ans que la Société Photographique des Universités de Lille explore les pratiques corporelles contemporaines, tout particulièrement les tatouages. Les premières séances de prises de vues ont vite démontré que les modèles ne concevaient jamais une esthétique des chairs et de leur enveloppe comme un acte superficiel de consommation culturelle ostentatoire qu’on confie à un designer à la mode. Tout tatouage a une densité, une profondeur, une vérité, mieux : une histoire, une histoire personnelle, singulière, intime. D’où le titre de l’exposition, qui se réfère évidemment à ce qu’évoque le film éponyme de Pedro Almodovar « la piel que habito ». Un autre titre, au moins aussi pertinent, est possible : « la peau que je suis », par référence aux cultures asiatiques dans lesquelles toute individualité est une peau quand les langues occidentales proposent plutôt d’avoir une peau. Ainsi cette exposition photographique défend l’idée que la peau est une construction mentale, psychologique, anthropologique, sociologique, historique, voire – plus souvent qu’on ne le croit - religieuse ou politique.

L’étendue du sujet n’est ici qu’effleurée par la présentation de 24 œuvres alternant deux pratiques photographiques bien distinctes : le portrait in situ et le portrait de studio. Les modèles sont des volontaires de tous âges, de tous sexes et de toutes conditions. Les photographes ont adopté un protocole immuable. Chaque tatoué-e devait d’abord accepter d’être interviewé-e et de raconter l’histoire, souvent très riche, des transformations de leur peau avant toute prise de vue. Les prises de vue cherchaient ensuite à mettre en scène ses signes distinctifs, soit ostensiblement en décor naturel, soit allusivement dans l’intimité du studio. Les œuvres présentées alternent exhibition et pudeur, mais toutes ont en définitive un secret.

Il est clair que la réalisation de cette exposition doit être créditée avant tout aux modèles-volontaires qui ont accordé leur confiance à la SPUL et dont les témoignages, souvent émouvants, ont marqué les photographes ayant participé à cette expérience. La SPUL tient à remercier les services d’Action Culture de l’université de Lille 3 pour son soutien enthousiaste à ce projet qui a ainsi la chance de prendre vie dans la belle clarté de ce hall de verre.

Nous remercions vivement "Action Culture Lille3" qui a assuré la production de cette exposition